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G. La résistance des Etats musulmans
Pratiquement aucune unité n'existe dans le monde musulman
avant les croisades. Les Etats sont morcelés et les califes n'exercent
pas de réel pouvoir. Cependant, la religion commune reliera peu à peu
ces différents Etats. Après la première croisade, les musulmans se
livrent périodiquement à des offensives. En 1102, Baudouin Ier
échappe de peu à la mort. Ce qui sauve les Francs est le conflit qui
persiste entre l'Egypte et la Syrie. En 1119, les Francs sont massacrés
au cours d'une bataille baptisée le "Champ du sang". De réelles
tentatives d'unification entre les différents clans musulmans
s'organisent. Cependant, il arrive que des émirs
fassent défection et les Arabes se retrouvent de nouveau en position de
faiblesse.
En 1144, Imad al-Din Zengi, régent d'un prince seldjoukide, parvient à
réunir Mossoul et Alep. Il marque le début de l'unification des Etats
musulmans. Cette époque voit naître l'idéologie de djihad. Il s'agit
d'un réflexe face au danger grandissant pour la religion islamique et
pour l'indépendance des musulmans. Le djihad ou guerre sainte vise à
soumettre les non-musulmans à l'islam. Celui qui commande les croyants,
généralement le monarque, doit effectuer une expédition tous les ans en
territoire ennemi. Zengi est assassiné en 1146. Son fils, Nûr al-Din,
prend le pouvoir et est nommé roi par le calife de Bagdad. Ce dernier
invoque le djihad contre les croisés. Son rêve est de conquérir
l'Egypte. Il finit par vaincre ce pays resté longtemps isolé sous la
dynastie fatimide et reprend le comté d'Edesse aux Francs en 1146.
Quelques mois plus tard, la dynastie fatimide est évincée et les
sunnites prennent le pouvoir.
H. SALADIN
"Regardez
les Franj ! Voyez avec quel
acharnement ils se battent pour leur
religion,
alors que nous, les musulmans,
nous ne
montrons aucune ardeur à
mener la
guerre sainte."
SALADIN
A la mort de Nûr al-Din, Saladin s'impose comme son successeur. Il
conquiert la Syrie, Damas et Alep. Il est prêt à écraser les croisés.
Qui est ce personnage mythique qui inspire aujourd'hui encore certains
chefs d'Etats arabes ? On se souvient de la propagande politique et de
l'appel à la guerre sainte lancé Saddam Hussein lors de la guerre du
Golfe.
Chef charismatique et brillant tacticien, Saladin chasse les
croisés de Syrie et de Palestine en quelques mois. En 1187, à la tête
de 30 000 hommes, il traverse le Jourdain et se retrouve face à l'armée
chrétienne de Guy de Lusignan, le roi de Jérusalem. L'armée franque
compte 20 000 hommes. Les Francs se réunissent à Séphorie, lieu sûr et
approvisionné en eau. Saladin tend un piège aux Occidentaux. Il
envoie une partie de son armée se battre à Tibériade. Les musulmans
prennent la ville sans problème. Les chefs des croisés décident d'aller
porter secours à Tibériade. Ils avancent lentement sous la chaleur et
en proie à l'épuisement.
Les musulmans les mettent en déroute sur les hauteurs de Qurn Hattîn
(cornes de Hattîn). Saladin écrase l'armée franque et le roi de
Jérusalem se rend.
Le chef musulman n'arrête pas sa progression. Ses troupes
se déploient en Galilée et en Samarie prenant sans peine les lieux mal
défendus par les croisés. Saladin décide de prendre Jérusalem. La chute
de la ville anéantit le moral des chrétiens. Néanmoins, le chef kurde
n'exploite pas assez cette victoire morale sur les Fancs car il éprouve
des difficultés à maintenir toutes ses troupes en campagne. Il avance
vers le Nord et prend les châteaux francs les plus faibles. Il hésite à
entrer dans les villes plus importantes comme Antioche et Tripoli. Les
deux ans qui suivent la bataille de Hattîn, Saladin récupère une partie
du royaume de Jérusalem et des dizaines de châteaux appartenant aux
Francs.
La reprise de Jérusalem par les musulmans est l'une des
actions les plus éclatantes de Saladin. Un siècle auparavant, les
chrétiens s'étaient livrés à un véritable carnage en s'emparant de la
ville. On aurait pu s'attendre au même comportement de la part des
musulmans. Mais le sultan se garde bien de telles atrocités. Il
laisse partir les habitants de la ville sans les massacrer. Il va même
escorter la population jusqu'à la côte et réquisitionne des bateaux pour
reconduire les Francs en Europe. Ce geste lui vaut une solide renommée
de générosité. Les chroniqueurs rapportent que Saladin éprouvait pour
le roi Richard Coeur de Lion une véritable admiration. Le voyant
combattre sur un cheval fourbu lors d'une bataille, il décide de lui
offrir deux magnifiques chevaux arabes !
A sa mort, en 1193, Saladin a repris pratiquement toute la
Palestine aux Francs. La guerre de succession pour le pouvoir durera
sept ans. C'est finalement son frère, Safadin, qui prend le pouvoir.
Saladin lègue un empire qui s'étend de l'Egypte à l'Asie Mineure. Ses
héritiers, des sultans
qui ne détiennent pas le pouvoir des monarques absolus, sont à la tête
d'un réseau familial composé de princes qui règnent sur des capitales
telles que Alep et Damas.
Les Ayyoubides sont souvent au centre de querelles
intestines entretenues par les Mamelouks (esclaves ou soldats provenant
du sud de la Russie) au service de chaque prince. En 1260, une invasion
de Mongols anéantit la dynastie ayyoubide et scelle la victoire des
anciens esclaves : les Mamelouks.
I. LA TROISIEME CROISADE (1189-1192)
Les réactions face à la défaite des Francs et la prise de
Jérusalem par Saladin ne se font pas attendre en France. Le successeur
d'Urbain III, Grégoire VIII, lance à nouveau un appel aux chrétiens.
Plusieurs rois entendent son appel : Richard Ier
d'Angleterre, Philippe II de France, Henri II d'Angleterre et Guillaume
II de Sicile. Ce dernier envoie sa flotte au secours des avant-postes
chrétiens de Tripoli, Tyr et Antioche.
Au Moyen-Orient, la situation est tendue entre les colons qui
se divisent. Certains sont partisans du roi de Jérusalem, Guy de
Lusignan, tandis que d'autres soutiennent Conrad de Montferrat qui a
battu l'armée de Saladin évitant la prise de Tyr par les musulmans.
Malgré ces luttes, ces crises politiques et personnelles, la troisième
croisade permet aux croisés de reprendre plusieurs ports côtiers et
assure la sauvegarde des colons en Terre sainte.
En juillet 1191, Acre tombe aux mains des Francs. Ensuite, le
roi d'Angleterre Richard atteint son premier objectif, Jaffa. Il tient
en échec Saladin qui essaye de reprendre Jaffa (août 1192). Le 2
septembre, un traité est conclu : les côtes entre Acre et Jaffa sont
sous le contrôle des chrétiens et les croisés pourront visiter le
Saint-Sépulcre à Jérusalem. Richard d'Angleterre repart pour son pays
le 9 octobre.
La troisième croisade s'achève par un échec partiel : le
comté de Tripoli, la principauté d'Antioche et la côte de la Palestine
sont sauvés. Cependant, Jérusalem n'a pas pu être libérée.
Malgré les épisodes douloureux de cette troisième expédition,
cette croisade est marquée par de grands moments d'entente entre
chrétiens et musulmans.
J. LES CROISADES POPULAIRES
Après les riches et les puissants, pourquoi les pauvres et
les humbles ne pourraient-ils pas libérer le tombeau du Christ ?
Les XIIIe et XIVe siècles verront se
succéder une série de mouvements de masse jaillis de l'enthousiasme
populaire : la Croisade des Enfants (1212), la première croisade des
Pastoureaux (1251),
la Croisade populaire (1309), la seconde croisade des Pastoureaux
(1320).
En 1212, un petit pâtre, Etienne, affirme qu'il a vu Dieu
sous les traits d'un pauvre pèlerin. Il était si maigre que le jeune
garçon lui a offert un quignon de pain. Avant de disparaître, Dieu lui
a expliqué qu'il fallait tout faire, cette fois, pour reprendre le
tombeau de Jésus aux Infidèles. Etienne, qui s'est mis en tête
d'accomplir la "mission" qui lui a été confiée, prévient d'autres
bergers, des enfants, des paysans. Bientôt, une troupe de 30 000
enfants (?), des pauvres en tout cas, se mettent en marche. Ils
arrivent de Normandie, de l'Ile-de-France, de Picardie. A la tête du
cortège, Etienne, monté sur un char. Lorsque la foule les interroge :
"Où allez-vous ?". En choeur, ils répondent : "A Dieu !". Cette foule
de pauvres gens veulent l'assentiment et l'appui du roi pour franchir la
mer et aller en Terre sainte. Le roi, se méfiant de ces jeunes
inspirés, leur ordonne de se disperser et de rentrer chez eux. Quelques
groupes désabusés obéissent, mais la plupart restent fidèles à Etienne
et descendent avec lui jusqu'à Marseille. Sur leur chemin, ils
rencontrent parfois des moines sarcastiques qui traitent le jeune
Etienne "d'ennemi du genre humain".
Mais les laïcs se montrent plus compatissants et leur
donnent des vivres. A Marseille, sept grandes nefs
sont affrétées et les enfants s'y entassent, parfois à plusieurs
centaines par bateaux.
Deux jours plus tard, la tempête les surprend et deux des embarcations
se brisent sur les récifs, non loin de la Sardaigne. Quelques années
plus tard, le pape Grégoire IX y fera élever un sanctuaire en la
mémoire des malheureux croisés. Les cinq navires restants seront
victimes de la traîtrise des marins. Les embarcations sont détournées
sur Alexandrie et les enfants sont vendus à des marchands où à des chefs
sarrasins. Ainsi se termine le rêve de ces enfants et de ces pauvres
gens sans même avoir atteint la Ville sainte.
Aucune de ces croisades populaires ne dure plus de quelques
mois. Nulle ne parviendra en Orient et beaucoup de croisés n'atteindront
même pas un port méditerranéen. Les sources retraçant ces expéditions
sont rares, car les seuls commentateurs sont des clergés qui leur sont
hostiles et qui ne les comprennent pas. Les participants de ces
croisades n'ont pas laissé de témoignages. Tous ces mouvements
populaires semblent avoir été inspirés par les propagandes des croisades
contemporaines, mais non comme l'auraient voulu le pape et les pouvoirs
séculiers.
Titre d'abord porté par les Seldjoukides, par lequel un calife
accorde des pouvoirs exécutifs.
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